Une étude hollandaise à été publiée le 2 septembre dernier dans la revue THE LANCET avec pour titre “Tendances de la mortalité sur cinq décennies chez les personnes transgenres adultes recevant un traitement hormonal : un rapport de la cohorte d’Amsterdam sur la dysphorie de genre” .
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L’étude explique que les personnes trans sont en moyenne 2 fois plus susceptibles de mourir dans l’année qui suit, par rapport au reste de la population.
La twittosphère n’a pas tardé à s’emparer de l’affaire et certaines citations de l’étude ont bien évidement été instrumentalisées pour défendre des idéologies “anti transgenre”. Parmi ceux ceux qui ont partagé l’étude, il y a par exemple :

Il y a aussi le cas d’un influenceur aux USA, Adam Crigler, 90k followers sur Twitter. Dans son tweet, il partage l’étude en citant un bout de la conclusion :

Quand on lit la citation choisie par Adam Crigler, on peut facilement comprendre que l’étude a démontré que l’hormonothérapie est la cause de cette augmentation du taux de mortalité. Ici, cette phrase isolée et sortie de son contexte, laissant entendre un lien de cause à effet.
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C’est ce qu’une partie de ses followers semblent avoir interprété, avec par exemple ce retweet :
“C’est ce qu’il arrive quand on autorise un trouble mental à devenir commun et populaire.
Essayez de changer la BIOLOGIE c’est jouer avec la foi. c’est triste mais vrai.
Ces personnes ont besoin d’aide, pas qu’on encourage leurs troubles.
Que Dieu les bénisse. Notre société à échouer à les aider”
L’hormonothérapie dans la vraie vie
Ces personnes sont dans une bulle de confirmation de leurs croyances, comme d’ailleurs toutes personnes sur les réseaux sociaux, ce qui pourrait ne pas être problématique, si ces croyances n’étaient pas confortées par une étude qui a des propos bien différents que ceux suggérés précédemment. Lisons donc ensemble la conclusion de l’étude, EN ENTIER.
La première phrase de la conclusion, minutieusement sélectionnée par Adam :
“Cette étude observationnelle a montré un risque accru de mortalité chez les personnes transgenres utilisant un traitement hormonal, quel que soit le type de traitement […]”
Et la suite de cette conclusion :
“ […] Ce risque accru de mortalité n’a pas diminué avec le temps. Les causes spécifiques de mortalité à savoir, cancers du poumon, maladies cardiovasculaires, maladies liées au VIH et suicides, ne donnent aucune indication sur un effet spécifique du traitement hormonal, mais indique que la surveillance, l’optimisation et, si nécessaire, le traitement des morbidités médicales et des facteurs liés au mode de vie restent importants dans les soins de santé des personnes transgenres.”
On a déjà de quoi compléter une petite checklist :
-Individu qui partage un article sans cliquer sur le lien : ✅
-Individu qui lit l’article et sélectionne la phrase qui l’arrange et la sort de son contexte pour tromper intentionnellement ses lecteurs : ✅
-individu qui partage sans réfléchir dès qu’une information semble conforter sa vision du monde afin de pouvoir écrire “j’avais raison !” : ✅
Heureusement qu’on ne fait pas ça en France concernant des sujets de santé globale graves et très importants comme la vaccination en période de pandémie ! …. oh wait… Mais si les hormones n’en sont pas la cause, quelle est-elle ? Allons creuser ensemble les VRAIES causes responsables de cette mortalité deux fois plus élevée.
Les causes de mortalité chez les hommes trans
On sait désormais que ce ne sont apparemment pas les traitements hormonaux des personnes trans qui augmentent ce taux de mortalité. D’après cette étude, les hommes trans meurent 1.8 fois plus que les femmes cis et 1.2 fois plus que les hommes cis.
On peut lire dans les résultats de cette étude :
“La mortalité chez les hommes transgenres était plus élevée pour les causes de décès non naturelles.”
Les deux principales causes observées de décès non naturels sont :
1 – les accidents : Il est donc ici question du fait que les hommes prennent plus de risques que les femmes dans au quotidien, ont des métiers plus à risque, et ont en moyenne une moins bonne hygiène de vie donc plus de maladies cardiovasculaires, ce qui est donc propre à la différence homme/femme, trans ou non.
2 – les suicides : Propre à la condition transgenre. Une des réponses au tweet d’Adam Crigler insinue que cela serait parce que les trans sont mentalement plus instables à cause de leur transidentité. “yes c’est parce qu’ils ont un trouble mental, et le seul fait de changer de sexe et/ou de prendre des hormones en supplément, ne résoudra pas leur problèmes plus profonds”
Et ça pourrait tenir la route, si on faisait abstraction totale de l’ÉNORME pression sociale qu’ils subissent, des discriminations au logement, à l’emploi et du harcèlement moral et physique auquel cette population fait face.
Et bien évidemment la moins bonne prise en charge en cas de troubles psychologiques qui contribue également à laisser ce taux de suicide plus élevé que le reste de la population. Le fameux retweet plus haut a vu juste “Notre société à échoué à les aider”, puisque c’est aujourd’hui la pression de notre société qui est responsable de cette santé mentale moins bonne chez les personnes trans et plus largement toute la communauté LGBT.
Les causes de mortalité chez les femmes trans
Les femmes trans ont quant à elles un taux de mortalité 2.8 fois supérieur aux femmes cisgenres.
Les causes principales annoncées par l’étude :
“La mortalité chez les femmes transgenres était plus élevée pour les maladies cardiovasculaires, les cancers du poumon, les maladies liées au VIH et le suicide.”
On ne reviendra pas sur les suicides, qui ont la même explication que pour les hommes et les femmes trans.
On pourrait interpréter le reste de la phrase en se disant que les maladies cardio vasculaires et les cancers du poumon plus fréquents peuvent être liés aux hormones, mais NON.
Comme l’a expliqué le Pr Martin Den Heijer dans une interview (un des séniors de l’étude) :
“une meilleure acceptation sociale, la surveillance et le traitement des maladies cardiovasculaires, du tabagisme et du VIH continueront d’être des facteurs importants pouvant contribuer à réduire le risque de mortalité chez les personnes transgenres”
Les maladies cardio-vasculaires sont tout simplement moins traitées que dans le reste de la population à cause d’un manque d’accès aux soins et d’une peur de la transphobie venant du corps médical. Les cancers des poumons sont eux expliqués par le tabagisme plus élevé. Une réaction due au stress plus important que subissent les personnes trans dans leur quotidien.
On trouve d’ailleurs aussi en réaction à ce stress, un taux de consommation d’alcool plus élevé dans la population trans, contribuant aussi au développement des maladies cardiovasculaires.
A cela vient s’ajouter la dernière cause principale de mortalité, plus spécifique aux femmes Trans, les décès par le VIH.
Ces décès devraient être bien plus bas dans les prochaines études sur le sujet, car comme spécifié par la Pr JM de Blok, première autrice de la publication, ces décès liés au VIH étaient essentiellement survenus dans les deux premières décennies de l’étude, donc avant les années 90. A cette époque, la contraception était bien moins développée, les rapports sexuels forcés plus nombreux, les dépistages beaucoup plus rares et les prises en charge médicales bien moins nombreuses ,en particulier pour les femmes trans.
Pistes de réflexion
Faisons donc maintenant une checklist des choses à cocher pour pouvoir réduire ce taux de mortalité :
- Formation du personnel médical aux besoins spécifiques des personnes transgenres
- Education dans les écoles à ce qu’est la transidentité et aux problématiques des personnes transgenres
- Développer une prise en charge plus rapide et plus spécifique des besoins psychologiques de la population transgenre
- Lire les articles de KseniaBis ✅
(c’est déjà pas mal un sur 4 non ?)
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