Le bombardement d’un hôpital pédiatrique à Marioupol en Ukraine le 9 mars par l’armée russe a suscité de nombreuses réactions à travers le monde. Hier, les autorités locales faisaient état du décès de 3 personnes dont une fillette. Pour justifier cet acte, le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a déclaré que le bâtiment servait de base au bataillon Azov. Dans le même temps, des ambassades russes déployaient une propagande intensive sur les réseaux sociaux pour tenter d’adoucir la gravité de la situation : réfutations systématiques, manipulation d’images, déni ou accusations hasardeuses, le tout en reprenant certains codes visuels du fact-checking. Focus sur la propagande des ambassades de Russie en France et au Royaume-Uni sur le bombardement de l’hôpital pédiatrique de Marioupol.
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Les faits
Le 9 mars 2022, l’hôpital pédiatrique de Marioupol est bombardé par l’armée russe entrainant la mort de 3 civils dont une enfant selon les autorités locales.
Certains internautes commencent alors à affirmer qu’il ne s’agit pas d’un hôpital pédiatrique. Affirmation rapidement réfutée par deux éléments : les photos de l’établissement présentes sur le site internet de l’hôpital (archive) et la comparaison d’un avant/après.
Branle-bas de combat des organes de propagande
Face à la médiatisation de l’évènement et à l’indignation générale, le porte-parole du ministère de la Défense russe, Igor Konachenkov déclare alors que “la prétendue frappe aérienne est une mise en scène totale à des fins de provocation afin d’entretenir l’agitation antirusse du public occidental” comme le rapporte La Presse. Un point de vue qui sera repris à l’unisson par de nombreux comptes d’ambassades russes à l’étranger. Notamment celle en France et au Royaume-Uni. Pour appuyer le narratif officiel russe, certaines ambassades vont jusqu’à afficher le compte Instagram d’une influenceuse Ukrainienne en la faisant passer pour une actrice.

Les ambassades expliquent alors qu’une des victimes serait fictive du simple fait qu’elle soit influenceuse sur Instagram. Elles vont jusqu’à utiliser un élément bien connu du fact-checking : le tampon “FAKE” sur les photos de l’évènement sans aller plus loin dans les explications. Comme si il était impossible pour une influenceuse d’être enceinte. Or, il s’avère que Marianna Podgurskaya, l’influenceuse ciblée par les ambassades, était bien enceinte et l’avait annoncé sur les réseaux sociaux.
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EDIT du 12.03.2022 : La journaliste indépendante Olga Tokariuk, a pu suivre la jeune influenceuse pour son accouchement. Les photos ont été postées tard dans la nuit :
La modération de Twitter a supprimé depuis de nombreuses publications provenant des ambassades sans pour autant restreindre l’accès au compte de ces dernières. Exemple ICI ou ICI.
Parmi ces publications partagées, une vidéo sensée démontrer une mise en scène des victimes. Des sous-titres ont été ajoutés comme dans cette capture par exemple :

Une question purement fallacieuse dans la mesure où la vidéo ne montre que les jardins du complexe hospitalier comme le révèle cette photo aérienne.
L’ambassade de Russie en France
Depuis le début la guerre en Ukraine, le compte Twitter de l’ambassade de Russie en France a tendance à sortir de sa communication institutionnelle habituelle et partage du contenu posté par des internautes lambda. C’est le constat effectué par Tristan Mendès France lors de l’émission les Désconpirateurs du 8 mars 2022. On constat avéré ICI et ICI.
Au delà de ce glissement inhabituel, le compte twitter de l’ambassade fait de nombreuses affirmations sans aucun fondement avec des promesses de preuves, restées vaines à ce jour malgré les multiples relances.

Le bombardement de l’hôpital pédiatrique de Marioupol en Ukraine est donc une “arnaque” (sic) pour l’ambassade de Russie en France.
Stéphane Capo a fourni une analyse détaillée des internautes qui “like” les publications du compte twitter de cette ambassade. (voir ICI le procédé). Le résultat est sans appel.





Les internautes qui ont “liké” les dernières publications de l’ambassade de Russie en France ont également “liké” les publications des comptes affichés ci-dessus. A quelques exceptions près, ils s’agit essentiellement de comptes de désinformation notoires et d’extrême droite. Autre détail, près de 20% des comptes qui “like” les publications de l’ambassade ont été créés il y a moins de 4 mois. La médiane est à 24 mois, ce qui signifie que 50% des “likers” ont un compte créé il y a moins de deux ans.
Après la suspension de diffusion des organes de presse RT et Sputnik en Europe, les ambassades Russes de différents pays semblent être devenues les nouvelles sources de diffusion de désinformation et de propagande russe sur les réseaux sociaux.
Article mis à jour le 12.03.2022 à 08h01 : Ajout des photos de l’accouchement de la jeune influenceuse.
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